lundi 3 février 2014

Au galop pour la vie

Éva a commencé l'équitation à 11 ans. C'est avec sa ponette, Wanda, qu'elle court au galop et grandit, c'est avec elle qu'elle franchit les obstacles de la vie. Au petit trot, elles ont appris à se connaître. Toutes les deux fortes têtes, elles se dressent à coups de regards et apprennent, pas après pas, saut après saut, le vrai sens de l'amitié et de la confiance. Dans le doux manège de l'existence, elles avancent ensemble, rêvant de conquérir les sommets, elles dansent la plus belle des chorégraphies équestres, celle qui les fait valser, unies par des liens si forts, des défaites aux victoires.
A 14 ans, Éva, cavalière au club hippique de Saverne, cumule une douzaine de récompenses dont les titres de vice-championne du Bas-Rhin en catégorie Poney 3, championne du Bas-Rhin pour la catégorie Poney 4 et championne d'Alsace catégorie Poney 4. 
Elle nous dévoile sa passion pour l'équitation.

Éva et Wanda
(Toutes les photos de cet article ont été prises par des amies d'Éva)
C'est quand elle avait huit ans que cette souriante cavalière est montée pour la toute première fois sur un cheval. Il appartenait à une amie de ses parents. Elle a fait une petite ballade sur son dos. Ce tout petit tour, ce contact si simple, si court, a changé toute la vie de la jeune fille. C'est cette rencontre, ce fruit du hasard, qui se révéla l'élément déclencheur de la passion qu’Éva voue aux chevaux, le révélateur du sens qu'elle voulait donner à son existence.
Un an plus tard, elle commença l'équitation. Elle se rappelle encore de son premier cours, au club hippique de Saverne : "J'ai monté Népal (ndlr : un poney du club). On a juste fait quelques pas dans la carrière. J'avais peur, mais, en même temps, j'étais super contente !". Si elle n'était pas très rassurée lors de cette première expérience, elle confie, avec cette joyeuse ambition si propre à la jeunesse : "J'ai tout de suite voulu continuer. J'ai voulu voir jusqu'où je pouvais aller."
Elle explique : "Les chevaux, je les ai toujours trouvé beau. J'aime les câliner, les brosser. J'aime le contact physique avec eux". "Quand tu montes, tu ne fais plus qu'un avec le cheval."
"Le saut, c'est ce que j'aime le plus", déclare la collégienne. "Quand je saute avec elle, j'ai l'impression de m'envoler !". "Mais j'aime aussi les ballades. C'est un moment de plaisir où tu es seul avec ton cheval."
Le dressage, cette discipline ancienne et très réglementée qui consiste à maîtriser les mouvements de sa monture, n'est pas très apprécié par Wanda, et donc par Éva ...
"Jamais je n'aurais pu aller si loin sans elle"
C'est peut-être à cause du caractère bien trempé de sa ponette. La jeune cavalière nous raconte l'histoire de leur rencontre : "Je voulais un cheval, alors j'ai regardé des annonces. Un jour, je suis tombée sur une annonce qui disait "petit cheval à vendre", on y est allé et on s'est rendu compte qu'il s'agissait de shetlands !
L'éleveur avait des poneys aussi mais ils étaient trop jeunes. Il nous a alors parlé du poney de ses parents, Wanda, qui était à Petersbach. Il nous a envoyé des photos puis on est allé la voir, j'ai exprès raté les cours pour y aller ! Quand je l'ai vu, j'ai eu un coup de foudre ! Je l'ai trouvé parfaite ! L'éleveur nous a montré comment elle galopait et comment elle sautait. J'ai pu la monter aussi. J'ai immédiatement voulu tenter l'aventure avec elle." Éva avait alors 11 ans. Elle se rappelle encore parfaitement de cette toute première rencontre et, quand elle en parle, ses yeux verts s'illuminent au récit de ce si beau souvenir.
Pourtant, les débuts de leur relation n'étaient pas des plus idylliques : "C'était horrible ! Elle ne m'écoutait pas, elle voulait constamment me faire tomber ! Franchement, j'ai voulu tout abandonner. Mais je me suis dit que non, je ne pouvais pas la lâcher. J'ai continué. Tout le monde me croyait incapable de la débourrer pourtant j'ai réussi avec l'aide d'une autre cavalière et le soutien de mon père." Ce poney n'ayant pas l'habitude d'être monté et encore moins de suivre des cours de sauts ou de dressages, il avait en effet fallu consacrer énormément de temps et faire preuve d'une grande patience pour réussir à discipliner cet animal si mignon mais si farouche.
"Wanda garde toujours son petit caractère rebel, mais il y a une vraie complicité entre nous. Ensemble, on peut tout faire. Tout ce que j'ai réussi jusqu'à présent, c'est grâce à elle. S'il fallait le refaire avec un autre cheval, je sais que je n'y arriverais pas. Jamais je n'aurais pu aller aussi loin sans elle."
Quand on entend Éva parler, on réalise que le cheval tient une place particulière dans sa vie. A ses yeux, les chevaux ne sont pas des animaux comme les autres : "C'est tout à fait autre chose !" déclare-t-elle. "Wanda, c'est un peu comme ma sœur. Elle m'apporte beaucoup de bonheur".
Avoir un cheval n'est cependant pas de tout repos. Eva doit se rendre presque quotidiennement au club hippique de Saverne où son poney est en pension : "Si tu ne viens pas pendant quelques jours, le cheval va déprimer. Le cheval tient à son cavalier. Il est heureux avec lui. Quand je vais voir Wanda au club, je l'appelle et, rien qu'au son de ma voix, elle me reconnaît, elle sort la tête et elle met les oreilles en avant. Même quand elle est au pré, elle reconnaît notre voiture, et elle galope pour venir nous voir."
"Wanda, c'est un peu comme ma sœur"
"Tu le vois quand un cheval est heureux. Il a les yeux qui brillent, et il hennit !"
Quand cette jeune demoiselle parle de ces animaux, on réalise combien leur comportement est proche de celui des humains. Comme nous, ils ont leur caractère, leur personnalité. Ils ont parfois envie de galoper, parfois non. Ils sont de bonne humeur, parfois non. Ils ont aussi leurs amis, leurs amours et leurs ennemis ! "Il y a des chevaux que Wanda n'aime pas. D'autres qu'elle aime beaucoup. Par exemple, elle n'aime pas les chevaux blancs ! En tous cas, tous les mâles craquent pour elle !"
Éva nous parle aussi du club hippique de Saverne : "Il y a environ 290 licenciés. Il y a deux manèges et deux carrières. Il y a deux grandes écuries et une petite à part pour les shetlands. Quand il fait froid, en hiver, on se retrouve avec mes copines au club house ou, la plupart du temps, aux chalets des moniteurs. Il y a vraiment une bonne ambiance au club. Je connais presque tout le monde. A force de croiser toujours les mêmes visages, on se parle un peu, on apprend à se connaître. J'ai une bande de copines, on a entre 13 et18 ans. Pourtant j'ai l'impression qu'on a toutes le même âge. On se voit aussi en-dehors du club. On parle de tout, de mode, des cours, et de sport !". Unis par une même passion, les licenciés du club hippique trouvent en ce lieu une seconde maison, un havre de paix entièrement voué à l'équitation.
Ils suivent tous des cours qui se déroulent toujours de la même manière : "D'abord, on brosse les chevaux. Il faut ensuite leur mettre la selle. On va alors au manège à l'intérieur ou à la carrière à l'extérieur où on commence la détente. C'est une sorte d'échauffement. On va d'abord au pas, puis au trot, puis au galop. On fait alors des exercices. Par exemple, pour les sauts, on commence par les barres les plus basses puis on monte progressivement. On termine par une douche en  été et, s'ils ont vraiment beaucoup travaillé, on les fait aussi marcher pour les faire souffler."
"Je connais Wanda, je sais ce qu'elle ressent"
Éva explique : "J'aime beaucoup la détente. C'est là que tu vois si le cheval va faire un bon cours ou non (...) Je sens beaucoup de choses quand je suis sur Wanda que je ne sens pas sur les autres chevaux. Je la connais, je la comprends, je sais ce qu'elle ressent."
Toute l'expérience et le savoir-faire de cette jeune demoiselle ont été validés à travers le passage des galops. Il s'agit d'un diplôme officiel délivré par la fédération française d'équitation et qui permet de reconnaître le niveau d'un cavalier. Des épreuves techniques mais aussi théoriques, telles que la connaissance de l'anatomie du cheval, doivent être parfaitement réussies afin d'obtenir le précieux diplôme. Éva a le galop 5.
A partir du galop 4, il est possible de tenter sa chance à des concours. Éva a déjà participé à une bonne vingtaine d'entre eux et a réussi à y décrocher pas mal de médailles.
Elle se rappelle du tout premier concours auquel elle a participé : "C'était à Obernai. J'avais 12 ans. C'était des sauts de 60 cm". Si, en concours, Wanda et Éva arrivent désormais à passer la barre des 90 cm, elles ont déjà sauté au-dessus de 1m10 en cours !
Éva nous fait part de ses émotions lors du concours qui reste le plus marquant à ses yeux : le championnat d'Alsace. "Franchement, je ne le sentais pas du tout ! Wanda était énervée et stressée ! Je ne pensais pas du tout y arriver."
La veille du concours, cavalier et monture se préparent. "On suit des cours spécifiques. On travaille les obstacles, la direction mais aussi la détente. Il faut bien préparer le cheval. Il faut le brosser pour qu'il soit beau. On lui met aussi des bandes aux jambes pour le détendre ainsi que du gel rafraîchissant. Et puis il faut préparer tout le matériel, graisser la selle, etc ..."
Toute cette longue et minutieuse préparation, à laquelle s'ajoute le stress du cavalier, alertent le cheval. Il sait ce qui l'attend et, conséquemment, il stress lui aussi, ce qui se manifeste pas des diarrhées et une forte agitation ...
Une fois arrivés au club qui organise le concours, cavalier et chevaux tentent de combattent leur appréhension,
chacun à leur manière. On fait brouter le cheval, on le fait marcher, en attendant la reconnaissance du parcours suivi par la détente puis le moment fatidique du passage.
Photo de Mickael Wimmer
Pour le championnat d'Alsace, Éva est passée en dernière. Elle confie : "Je préfère passer en dernière, au moins, tu peux regarder tous tes concurrents. Tu vois le meilleur temps, et ça te donne envie d'aller à fond pour réussir à le dépasser ! En regardant les passages des autres, j'essaye aussi de voir les erreurs à ne pas faire et, bien sûr, ce que je peux faire de plus."
Elle partage les fortes émotions qu'elle ressent lorsque son tour arrive : "C'est hyper stressant ! Tout le monde te regarde ! Et tu as une grosse pression parce que tu sais qu'il y a des gens qui comptent sur toi, qui veulent que tu gagnes."
Tous ces regards, toute cette tension, Eva l'oublie quand la cloche retentit. Au moment de ce top départ, Wanda part d'elle-même au galop. Poussée par son propre stress et celui d’Éva, la ponnette donne tout ce qu'elle a, encouragée par sa cavalière qui la guide d'un obstacle à un autre. Aller vite, très vite, ne pas se tromper d'obstacle, ne pas se louper, ne surtout pas s'arrêter. "A ce moment là, je ne pense plus à ce qu'il y a tout autour de nous. Même si mon moniteur me parle, même si les gens crient, je ne les entends pas. Je n'entends rien du tout. Je suis juste concentrée sur les obstacles. Je les compte."
C'est grâce à cette concentration extrême et cette union parfaite qu'elle forme avec son poney, qu’Éva réussi dans tout ce qu'elle entreprend. Wanda fait partie de sa vie, elle est comme sa confidente, sa meilleure amie. Toutes deux se comprennent et partagent des émotions et des secrets bien à elles, que jamais personne d'autre ne pourra saisir. Elles sont unies par un même sport, une même course, un même saut. Ensemble dans les entraînements, ensemble face aux stress des concours, ensemble pour la gloire des médailles. Pas besoin de mots, tout passe par les regards, le toucher, et un extraordinaire ressenti qui ne peut naître qu'au sein d'une confiance gratifiant un partage parfait et unique.
Wanda !
(Photo que j'ai prise il y a quelques années ...)
Il ne faut cependant pas oublier que l'équitation reste un sport dangereux, qui peut même donner lieu à des accidents mortels. Cette jeune cavalière savernoise n'a encore jamais fait de chute grave. Elle se rappelle pourtant très bien de la première fois où elle est tombée de cheval : "ça fait toujours peur, surtout la première fois. Tu te vois tomber au ralenti. Et quand tu touches le sol, ça fait si mal que tu as les larmes aux yeux et tu n'arrives plus à respirer." Elle ajoute : "En fait, j'ai vraiment eu peur une fois quand Wanda s'est cabrée devant moi. Je voulais la faire travailler, elle n'avait pas envie, alors elle a essayé de prendre le dessus sur moi en se cabrant. Ses sabots ne sont pas passés loin de ma tête !"
"Mais le moment où j'ai réalisé qu'un cheval pouvait vraiment être dangereux c'est quand Wanda est tombée avec la cavalière qui la montait à l'époque pour m'aider à la débourrer. Quand je les ai vu tomber toutes les deux, j'ai vraiment eu très peur. Je n'osais plus monter Wanda. Mais mon père m'a poussé. Et puis j'ai réalisé que c'est un cheval, c'est un animal qui peut se montrer sauvage. Ce sont des choses qui arrivent, ce n'est pas pour autant qu'il faut abandonner."
Éva préfère mettre en avant le bonheur de la course, la sensation du vent qui "vient sur toi", le plaisir de se sentir libre. Elle est aussi fière d'arriver à maîtriser un cheval aussi grand, lourd et puissant.
Si elle ne sait pas encore si elle pourra faire de l'équitation son métier, ce qui est très difficile, elle est sûre d'une chose : "Je sais que je n'abandonnerai jamais le cheval. Et je ferai de mon mieux pour aller au plus haut niveau."
"Je n'abandonnerai jamais l'équitation."


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