jeudi 18 août 2016

Dix Minets : Tatouage et cause animale !

"Pourquoi est-ce que tu pratiques ton art ? Y a-t-il un message que tu veux faire passer ?"
C'est la question que je pose à presque toutes mes interviews, une question à laquelle les gens ont souvent du mal à répondre.
Dix Minets a été claire : ce qu'elle veut, c'est défendre la cause animale.
Cette jeune artiste, issue de l'illustration, fait partie de cette nouvelle génération de tatoueurs qui s'exaltent avec passion et talent devant les nouvelles techniques offertes par le tattoo.
C'est un honneur d'avoir pu la rencontrer et je suis fière de te montrer cet article dans lequel elle évoque avec un sourire constant son amour de l'art, du tatouage, et des animaux !




Une artiste engagée


Des éléphants, des renards, des cigognes, des libellules ou des hirondelles, Dix Minets tatoue principalement des animaux, avec une une finesse incroyable, avec réalisme, en ajoutant par ci par là des notes plus graphiques, des ornementations florales ou des paysages lunaires. 
Sa passion pour le tatouage, et les petites bêtes, comme les plus grosses d'ailleurs, transparaît totalement à travers ses œuvres.
"Je trouve les animaux reposants. Ils ont cette intelligence, cette sagesse, cette innocence, que j'aimerais pouvoir retrouver chez les humains."
"Ça me touche quand quelque chose de mal arrive aux animaux, surtout quand ce sont les hommes qui sont responsables. Je me suis beaucoup documentée sur les expérimentations animales, sur les pêches à la baleine, les corridas, ..."
"Quand j'étais ado, je ne me suis pas rebellée contre mes profs, ni contre mes parents, mais contre toute la planète !"

Dix Minets est clairement une artiste engagée. Elle explique :
"Je me sers de mon statut de tatoueuse pour envoyer des petits messages subliminaux, sans être "chiante" pour autant. Si on s'intéresse au message que je veux transmettre, tant mieux, sinon tant pis, les gens ne sont pas obligés de regarder ce que je fais si ça ne leur plaît pas."
"Dans le combat pour les animaux on trouve beaucoup de gens très énervés, qui y vont trop fort. Or je trouve que pour faire passer un message il n'y a rien de mieux que de le faire avec douceur."
"J'essaye de sensibiliser les gens avec les petits textes que je mets en-dessous des dessins que je publie, cela permet d'apporter des informations."

Cette exaltation qui la caractérise si bien remonte à loin.
"Depuis toute petite je dessine beaucoup. J'ai toujours dessiné des animaux, je collectionnais des images d'animaux, je les photographiais. Je les ai toujours adoré."
"Je suis passionnée par les animaux. Quand je découvre un animal, je vais m'intéresser à lui à fond. Je vais faire des recherches pendant des jours ou des semaines pour en apprendre plus sur lui."
"Ça se voit d'ailleurs. Si tu remarques que tout à coup je ne fais que des planches d'autruche, c'est parce que j'ai décidé de m'y intéresser !"
Bien plus que de simplement dessiner des animaux, ce qui est déjà beaucoup quand on voit le grand talent avec lequel elle le fait, Dix Minets va s'appliquer à découvrir un maximum de choses sur lui. Ainsi, quiconque lui demande un tatouage d'un animal peut être sûr qu'elle va s'attacher à mieux le connaître.
Elle ajoute : "Par exemple, pendant un moment, tous les clients me demandaient des chouettes ! J'ai dû en faire vraiment plein ! Mais même après plusieurs chouettes, j'arrivais toujours à m'en sortir, à m'amuser. C'est grâce à ça que j'ai découvert de nouvelles races de chouettes que je ne connaissais pas."



De l'illustration au tatouage


En plus de cet intérêt porté aux animaux, Dix Minets passe également beaucoup de temps à faire des recherches sur les dessins en eux-mêmes, alliant ainsi forme et fond.
"Le tatouage est quelque chose qui va être vu, même si ce n'est que dans l'intimité. C'est donc important qu'il y ait aussi une logique graphique. Alors j'ajoute des détails, ou des ornements, comme des feuilles, pour avoir un côté plus graphique. Comme ça tu n'as pas qu'un chat, mais un chat stylé !"
"C'est une forme de jeu aussi quand tu as une tête de chat, avec plein de choses à ajouter, c'est complexe, tu dois faire plein d'essais ! J'aime beaucoup cette partie de recherche dans le dessin, cette impression que tu n'y arriveras jamais et puis finalement ça marche !"
Si la majorité des tatouages qu'elle réalise actuellement sont en noir, elle précise : "J'adore la couleur ! Au début je n'en faisais pas, je préférais apprendre progressivement. Et j'ai réalisé qu'on pouvait faire de belles choses avec le noir d'ailleurs. On peut réaliser de beaux contrastes, et suggérer des couleurs même s'il n'y en a pas. Je me suis étonnée moi-même à me plaire dans le noir alors que mes tableaux étaient toujours très colorés ! Mais j'aimerais tendre de plus en plus vers la couleur."

D'ailleurs, quand Dix Minets faisaient principalement de l'illustration, ses œuvres étaient toujours très colorées. Elle explique : "J'aime me lâcher sur le papier avec de la peinture, avec beaucoup de couleurs, plein d'images qui se mêlent de façon un peu fouillis, alors que maintenant je recherche un peu plus de clarté."
Pour mieux comprendre son style, voici un extrait de ce qu'elle a écrit à l'époque à propos de ses illustrations :
"Même s'il y a l'omniprésence des animaux dans mes images, je pense qu'il y a à boire et à manger dans ce que je fais. Il y a très souvent un message, une pensée à déceler. On peut choisir de ne voir qu'une image qui nous plaît, ou alors d'y voir un message fort. Ensuite, pour décrire mon "style", c'est là que ça se complique. J'aime avoir une partie de mon image très claire et lisible, et un fond très flou. Mon but est de donner le ton de l'image avec cette partie réaliste, et de laisser l'imagination de celui qui la regarde décider de ce qu'elle veut dans la partie qui est plus floue. Il est important pour moi de ne pas faire des images bavardes, mais qui laissent une grande place à la rêverie."
J'ajoute aussi une phrase qu'elle écrivait derrière la plupart des bouquins qu'elle éditait aux arts décoratifs :
"Conte où le réel côtoie de près le rêve et l’irréel. Le réel peut être rempli d'angoisses et de paysages intriguant, mais encore plus libres sont les interprétations que chaque visiteur fera de ce songe."




Dix Minets travaille désormais dans son atelier privé, à Strasbourg, où elle a une pièce exclusivement réservé au tatouage.
Je lui demande alors de revenir sur son parcours.
"J'ai commencé le tatouage il y a deux ans. En fait, j'ai commencé à la punk, avec une aiguille et de l'encre de Chine ! Je voulais imité un pote qui l'avait aussi fait à l'aiguille, je trouvais ça stylé."
"Du coup il n'y a pas eu de passage à l'acte, de "Oh mon dieu ! Je vais me tatouer !" Et ça a permis de totalement dédramatiser le côté "truc que tu vas garder à vie" ou "que vont dire mes parents". Ça c'est vraiment fait très naturellement."
"Suite à ça, j'ai commencé à m'y intéresser plus profondément. Je suis allée me faire tatouer dans un shop à Paris pour voir comment on faisait."
"Ensuite j'ai acheté une machine. J'ai commencé par tatouer ma meilleure pote, et ainsi de suite."

A propos de sa formation, elle explique de façon plus détaillée : "Je pense que ma meilleure formation, c'est l'ouverture d'esprit de ma mère, qui dès mon plus jeune âge m'a fait découvrir le théâtre, le cinéma, les livres, les musées, la musique et tout ce qui maintenant, fait partie intégrante de mon imaginaire."
"J'ai tout de même rapidement entamé ce qu'on peut appeler une « formation ». J'ai suivi pendant mes trois années de lycée des cours particuliers avec l'illustratrice Bénédicte Némo, elle m'a éveillée à toutes les possibilités que nous avons en illustration et libérée de toutes les barrières, en me faisant comprendre que l'art  n'était pas enfermé dans une trousse avec un crayon et trois pinceaux. J'ai suivi après le lycée un an de prépa à Paris, ce qui a débouché sur une entrée aux Arts décoratifs de Strasbourg, une école dont j'ai été diplômée d'illustration en 2014."



"Ce n'est que progressivement que j'ai découvert que l'illustration n'était pas le métier dont je rêvais. Non, c'est le tattoo !"
"Dans l'illustration, je pensais qu'on allait me choisir pour mon style, mon univers, qu'on pourrait beaucoup discuter avec les clients à propos des dessins ... Alors qu'il n'en ait rien. En fait, tous ces aspects là qui me plaisent tant, je les ai trouvé dans le tatouage ! "
"Ça a fait tilt, j'ai réalisé que c'était ça le métier dont je fantasmais. J'ai réalisé que je faisais ce dont je rêvais. Que je vivais de ma passion."
"Et c'est ça qui me plaît maintenant, je rencontre des gens qui viennent me voir parce qu'ils trouvent mes dessins cool !"
"C'est aussi lié au fait que je ne fasse pas de pub. Quand on me contacte, c'est parce qu'on a vu ce que je fais, et qu'on l'a apprécié. On me demande donc presque tout le temps de faire des trucs en rapport avec mon univers."
"Je sais qu'à chaque fois que je reçois un mail, ça va être quelque chose de positif !"



"Tout au long de mes études, on a voulu me mettre dans une case. Quand j'étais étudiante, on me reprochait de défendre la cause animale. On me disait : tu es une artiste donc tu es censée chercher une cause plus profonde ..."
"Alors c'est une vraie victoire quand les gens viennent me voir parce qu'ils partagent aussi la cause animale. Et c'est cool de rencontrer des personnes qui partagent ça, ça fait un petit lien avec moi, et ça me touche."
"J'ai vraiment envie d'en parler, j'aime rencontrer des personnes qui sont intéressés par la cause animale, et qui apprécient mon style."
"D'ailleurs, je pense de plus en plus aux expos. Je crois que j'aimerais bien ça, et surtout que ça m'aiderait à défendre la cause animale."

Si Dix Minets s'est aussi rapidement sentie à l'aise dans le milieu du tatouage, c'est notamment grâce à trois autres jeunes tatoueuses : Cheyenne, Ank et La Spectre : "On s'est rencontrée chacune petit à petit, un peu par le biais du hasard. On a appris à s'apprécier, et à s'entraider petit à petit."
"Cheyenne me pousse beaucoup, elle aimerait que je participe à des expos, des conventions, ... Elle m'a aidé à créer ma page, à me lancer. On se complète, et on se soutient. On forme une petit crew de filles qui tatouent avec Ank et La Spectre."

Dix Minets en train de tatouer Cheyenne
Photo de "No Money Worker Project"


Dix Minets est une fille rayonnante, d'une grande gentillesse, passionnée par beaucoup de choses, et notamment par le tattoo.
"La technique a tellement évolué, on peut vraiment réaliser des choses incroyables, et c'est très motivant ! On peut tout faire, on découvre chaque jour de nouvelles choses, alors ça te donne envie de continuer ! De toute façon, ça ne peut pas régresser, le tatouage ne fera que devenir de plus en plus cool !"


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